Wednesday, April 19, 2017

Elyahou 27-03-17 4/5

Il n'imposait pas de méthode. Il tentait de révéler l'élève à lui même à
travers la musique.
André est devenu religieux en arrivant en Israël. Les juifs hongrois avaient
peur de dire qu'ils étaient juifs
A son arrivée ici, lors d'une réunion d'intégration, une assistante sociale a
proposé une chambre dans une maison d'étudiants juifs. André s'est levé
et a dit que ça intéressait un ami à lui.
Elle lui a alors suggéré de venir la voir. Là il a avoué que c'était pour lui
mais qu'il avait honte de le dire parce qu'il était hongrois. Elle l'avait bien
compris.
Dans cette maison il a commencé à découvrir ce qu'était la vie juive.
Ce n'était pas une Yechiva. Seulement une maison d'étudiants auxquels les
juifs avaient le droit. La religion n'était pas imposée. Il y avait des juifs
provenant de partout qu'André a pu côtoyer.
Les chambres étaient doubles (2 lits 2 bureaux). Au début il est tombé
avec un américain qui lui aussi venait de parents conservateurs mais qui
commençait à pratiquer. André qui était un intellectuel a commencé à
s'intéresser à la religion et à l'étude du Talmud.
Ce garçon qui est devenu son ami s'appelait Burt...... . Il était originaire de
New York. Il étudiait à l'école du cinéma, l'IDEC.
André a, par la suite, composé des musiques de films pour lui.
Ils ont commencé, à cette époque, à nouer une amitié.
Quand Burt a fini ses études, ils ont eu un film à faire. Ils sont donc partis
à Rome en tant que réalisateur pour l'un et compositeur pour l'autre.
Burt ne travaillait pas le Chabbat ce qui créait des tensions avec la
production. Pour ceux qui paient chaque minute est précieuse.
André était tellement étonné que quelqu'un puisse avoir cette force
morale de croyance.
Après ces 2 mois passés ensemble (le tournage s'est déroulé en Grèce et
le montage du film à Rome), je suis allé les rejoindre en stop pour
quelques jours.
A son retour à Paris, André a continué à étudier la Guemara. Il a tenté de
m'emmener à ces cours. Je n'ai pas tenu plus de 3 fois, à cause duroblème de langue. André, lui, parlait 9 langues y compris le tzigane que
l'on parle en Hongrie.
Je me souviens du nom du Rav qui était un homme extraordinaire : Rav
Weistein. J'étais aussi avec Dadou, juif tunisien, qui n'a pas supporté.
André a rencontré Dadou quand il finissait ses études au Conservatoire
National de Paris. il avait trouvé un poste de professeur à Tunis. Un de ses
amis de la maison des étudiants lui a donné des adresses à Tunis et c'est
là qu'il a rencontré Dadou. Il est décédé il y a 3 ans.
Il était aussi devenu un très grand ami à moi.
André a découvert en Tunisie ce judaïsme séphardi qui est quand même
détaché de l'étude mais qui tient par les mères et les coutumes.
André se disait comme un nuage. Il pouvait rentrer dans un trou et
prendre la forme du trou.
Il était aussi à l'aise avec les religieux, qu'avec les gens de la synagogue ou
les compositeurs. Il a su recrée ça ici. On ne voyait pas chez lui de
sectarisme.
C'est a son retour à Paris que nous avons habité ensemble, rue des
Poissonnières, et qu'il a écrit son livre Microcosmos pour Guitare, sorti
dans les années 78.
L'appartement que nous habitions était extrêmement vétuste. C'est nous
qui avons fait les travaux de rénovation. A l'époque, je faisais toutes
sortes de petits travaux pour gagner de l'argent.
Nous étions tous les deux musicologues et nous fréquentions une
université, où toutes les semaines, il y avait un colloque ou un séminaire
où les musicologues venaient parler de leurs recherches. Un israélien est
venu et a rencontré André. Il a pu lui obtenir une bourse pour venir en
Israël.
Comme il le dit dans ses poèmes, André n'aimait pas Paris.
"Paris est une ville si dure
Elle m'a rouvert la blessure qui suppure
Elle n'en a cure"
En arrivant en Israël, il a eu un grand choc. Il était déjà un peu religieux. Il a
commencé à enseigner et il n'est jamais reparti.
Il a reconstruit son cercle d'amis. Des gens lui ont parlé de Ruth.
Ils se sont rencontrés plusieurs fois. Lui, devait faire ses milouimes et il
souffrait tellement de cette séparation, qu'il a voulu se marier avec elle.
Par sa rencontre avec Ruth, il a vraiment ressenti le besoin de s'ancrer
quelque part, d'avoir un pays. Même si il n'était pas spécialement sioniste.
Ruth était une femme admirable qui s'est consacré à ses enfants et à
André qui était aussi comme un enfant.
J'aurai du moi aussi faire ces milouimes mais ils m'on relâche au bout de 3
mois de tergiversations . Comme pour l'armée en France où j'ai du jouer
serré. Simulant la folie, faisant des choses délirantes (ne pas dormir, boire
du café à la cuillère, faire pipi au lit, me mordre la langue), tout ce qui
dérangeait mais sans violence, sans opposition intellectuelle, jusqu'à ce
que j'arrive à être envoyé à l'infirmerie et réformé.
Je ne supporte aucune forme de discipline . Et surtout pas celle de
l'armée qui transforme tellement les gens.
Grâce à ça, j'ai gagné plusieurs années. Je ne m'imaginais pas en Algérie,
tuer ou être en conflit avec des arabes que je connaissais pas.
Le fait de donner la nationalité française aux juifs et pas aux arabes à été
une forme d'oppression coloniale qui a empêché les arabes d'évoluer. Et
qui a créer leur ressentiment.
Oran était une ville multiraciale et dès que les juifs ont eu le passeport
français, ils ont eu des situations professionnelles, se sont embourgeoisés
comme les français après la guerre.
C'est pour cela que mon père, comptable, est devenu commerçant. Par
amour pour ma mère.
Dans le commerce, il fallait faire des simagrées pour vendre. Ma mère
était peu là, et vendre de la lingerie à une femme c'est compliqué pour un
homme. Il était perdu dans ce magasin. Il n'avait choisi ce métier que pour
faire plaisir à sa femme.
Pour lui, être comptable c'était une liberté, avec des horaires de bureau
qui lui laissaient du temps libre. Le commerce c'était l'esclavage, il n'avait
plus de vie.
Nous, les enfants n'avons pas eu d'enfance. On les attendait très tard
pour manger, on mourrait de faim. On vivait dans la sous pente du
magasin.
Ce magasin pour moi était un peu comme un théâtre, une caverne
d'Alibaba, les salons d'essayages avec les rideaux.
Je n'aimais pas la manière de penser des gens d'Algérie. Il n'y avait pas
d'exemple, on ne faisait pas les Fêtes. Mon père pour faire plaisir à ma
mère, faisait Kippour. Il profitait de ce jour de congé pour lire des romans
policiers.
Mon frère est devenu religieux après sa barmitsva. Aujourd'hui toute sa
famille est religieuse. Ma soeur a été un petit peu religieuse par rapport à
son mari qui le lui avait demandé.
Moi, j'ai détesté aller à la synagogue. Je ne comprenais rien. On ne
m'expliquait rien. Je considérais tout ça comme des rituels. Une bonne
nourriture, mais qui, si elle n'est ni expliquée, ni enracinée, est juste de la
nourriture sans plus.
Derrière cette culture de la bouffe, il y a une recherche de racines,
d'exotisme ou de dépaysement.
Ma tante était une grande cuisinière. Ma mère non. Elle, elle aimait parler,
avait une volonté de puissance. Le matin, elle dirigeait toute la famille. Elle
organisait la vie des autres. Sa soeur aînée, ma tante, était très influencée
par elle. En passant tout son temps au téléphone, elle influençait
beaucoup de gens.
L'après-midi, elle descendait travailler avec mon père. Nous, les enfants
étions ballotés et souvent seuls quand on rentrait à la maison.
Heureusement, il y avait Alice, une dame que j'aimais beaucoup, réfugiée
d'Espagne, qui était très affectueuse. C'est elle qui s'occupait de nous
quand on rentrait à la maison. Elle nous faisait goûter, et restait avec nous
jusqu'à 7h.
Ma mère était absente à cause, peut être, de sa structure psychique.
Je ne dirai pas qu'elle a été une mauvaise mère. Non. Enfin, en tous les
cas, je ne l'ai pas ressenti ainsi.
Quand on a une mère absente, le bébé devient absent à son tour.
Ils ont aussi été dépassé par l'enfant que j'étais.


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