Ma
vie avec Frédérique H.
J'ai
rencontré Frédérique à la Schola Cantorum.
J'étais
alors professeur dans cette merveilleuse école qui a aussi abrité Erik Satie, un de mes compositeurs préférés. André
aussi l'appréciait beaucoup.
C'est
grâce à Frédérique que le recueil MICROCOSMOS POUR GUITARE a pu être édité.
Elle a non seulement trouvé un éditeur mais a également fait éditer les
transcriptions des suites françaises pour piano de J.S. Bach que nous avions réalisé
avec Gérard Iglesia.
Nous
avons enregistrés ces suites, le temps d'une nuit, dans une église parisienne.
Le
disque est encore vivant aujourd'hui. Un jour, André m'a invité pour mon
anniversaire et m'a fait la surprise de m'accueillir au son de ce disque.
Ma
vie avec Frédérique a duré 3trois années.
Elle
était mon élève et voulait jouer de la guitare sans avoir d'idée précise.
Elle
voulait aussi écrire. Elle est née à Saint Germain en Laye.
Après
quelques mois de rapports professeur-élève, elle m'a invité à un concert de
guitare qui avait lieu à la maison de la Radio.
Dans
la vieille Quatre Chevaux Renault que nous avions prise pour aller à ce
concert, elle me prit la main durant le chemin.
C'est
ainsi que j'ai trahis ma déontologie de professeur.
Quelques
temps après, nous avons commencé à vivre ensemble, rue des Blancs Manteaux. Frédérique
voulait quitter ses parents et venir vivre avec moi.
J'ai
dû abandonner mon attitude de professeur pour apprendre à être un amant.
Un
peu plus tard, ne voulant plus être une élève, Frédérique souhaitât devenir une
chanteuse s'accompagnant à la guitare.
Après
quelques mois de vie commune, rue des Blancs Manteaux, nous avons décidé de
nous installer dans une petite maison à étage, située à Maisons- Laffitte.
Nous
avons emménagé avec deux amis : une amie d'école de Frédérique et Tony Gatlif
qu'elle avait rencontré à son cours de théâtre.
Sylvie
Y., une autre amie de Frédérique, de ce même cours de théâtre se liera avec
Dadou quelques années plus tard.
Tony
Gatlif est devenu un grand metteur en scène. Il est né en Algérie de mère
tzigane.
Nous
avions l'habitude de prendre le petit déjeuner ensemble.
Je
l'écoutais me raconter ses désirs de devenir metteur en scène.
Trente
ans plus tard, nous nous sommes retrouvés dans un café de la place Saint Michel
à Paris. Là, il a continué à me raconter ses films, disant qu'il avait
introduit dans ses scénarios la manière que j'avais de me comporter durant nos
petits déjeuners. Comme si le temps n'avait pas passé.
Tony
Gatlif avait demandé à Frédérique si je voulais écrire des chansons pour un de
ses premiers films. Frédérique a écrit les paroles de deux chansons, et j’en ai
composé la musique.
Notre
cohabitation à Maisons-Laffitte a duré un an.
Loulou
T. venait souvent nous visiter dans sa voiture de sport. Son travail de maquettiste lui rapportait
beaucoup d'argent et lui avait permis de réaliser ses envies de se sentir
puissant dans une voiture de sport et sur ses motos.
L'année
deux mil seize, après quarante ans de silence, il est venu me visiter à Jérusalem
où nous avons passé trois jours ensemble.
J'ai
pu ainsi rafraîchir ma mémoire et celle de notre amitié avant notre séparation.
Malgré
ma volonté de nettoyer cette relation, je ne pense pas avoir réussi entièrement
à le faire.
Notre
première dispute, après toutes ces longues années, a eu lieu devant le tombeau
du Christ, à l'église du Saint Sépulcre à Jérusalem.
Loulou
m'a poussé à bout et j'ai senti que toutes ces années de silence n'avaient pas
réussies à faire oublier le problème qui s'était cristallisé dans notre
relation.
Sortant
de l'église en silence, un froid terrible s'était installé entre nous.
Je
n'avais plus envie de lui parler.
Nous
nous sommes assis dans un petit café. Le silence persistait.
Après
avoir dégusté un café turc, il s'est mis à parler et nous avons réussi à briser
la glace qui s'était installée.
Il
a passé quelques jours à Tel Aviv, puis est revenu deux jours avant son retour
en France.
Quelques
temps avant cette visite de Loulou, je me trouvais à Paris avec Dadou,
Boulevard Beaumarchais, quand il reçut un appel sur son portable.
Il
a ouvert son téléphone, écouté la voix, et sans dire un mot m'a passé le téléphone.
C'était Loulou.
C'est
ainsi que nous avons repris parole avec Loulou.
Je
suis allé le voir dans son studio qu'il habite avec son chat, dans le dix-septième
arrondissement.
Nous
avons passé trois heures ensemble, pour moi très agréables. Il m'a montré son
travail pictural en me parlant longuement de ses conversations avec son chat,
très jaloux de le voir peindre.
J'aimais
le rire de Loulou, et nous avons quand même réussi à rire ensemble pendant son
séjour Hiérosolymite.
Je
me souviens des sourires d'André mais pas de son rire.
Quelques
temps après, André a reçu une lettre de Loulou qu'il m'a fait lire. J'étais un
peu triste et jaloux qu'il ait écrit seulement à André.
Un
peu plus tard, Loulou m'a téléphoné me disant que la lettre qu'il m'avait écrite
était revenue. Je me sentais un peu idiot d'avoir été jaloux.
Il
me remercia pour le texte que je lui avais remis au moment de son départ en lui
demandant d'attendre d'être dans l'avion pour le lire. Il l'a trouvé très beau
et m'a demandé si j'en étais l'auteur. Je n'ai pas pu répondre, je ne m'en
souvenais plus.
Frédérique
et Loulou sont restés ensemble plusieurs années. Ils ont eu un fils.
Ils
se sont séparés dernièrement.
Lors
de mon séjour parisien, au cours duquel j'ai repris contact avec Loulou grâce à Dadou, Frédérique m'a invité pour un
repas chez elle.
Elle
avait également invité Loulou et Muriel, une amie perdue de vue depuis
longtemps.
Ayant
oublié ces dîners parisiens et cette manière de vivre, je me suis trouvé autour
d'une table française où le vin coulait largement et au fur et à mesure, la
parole s'élevait.
C'était
pour moi un spectacle étrange. Je me sentais être tombé d'une autre planète.
J'ai
pris l'habitude, en Israël, de rencontrer mes amis dans les cafés. Je n'aime
plus me trouver coincé dans les appartements des autres.
Frédérique
a essayé d'être chanteuse, interprète de ses propres textes et musiques. Elle a
abandonné cette voie.
Elle
a écrit et publié un livre sur le Dalaï Lama. Ces derniers temps, elle est
devenue peintre, se défendant toujours de l'être devenue à cause de sa liaison
avec Loulou.